L’Agence Française Anticorruption (AFA) a publié son rapport d’activité 2020, qui dresse un panorama de son activité dans le cadre particulier d’une année marquée par la pandémie de Covid-19. L’agence note qu’après quatre années d’application, les dispositions de la loi du 9 décembre 2016 (dite “Sapin 2”) ont été mises en œuvre, et portent des fruits, même si l’Agence ne dispose pas des moyens qui lui ont été promis. Les limites du txte se font sentir :
- Elle ne permet pas d’appréhender la situation des groupes étrangers qui exercent une partie de leurs activités sur le territoire national, ce qui crée une distorsion de concurrence au détriment des groupes français ;
- Elle n’offre aucune possibilité de contraindre les acteurs publics, ne fut-ce que par le prononcé d’injonctions, ni même de contrôler certaines structures comme les groupements d’intérêt public, les sociétés publiques locales, les associations faisant appel à la générosité publique ou certaines fondations et établissements financés sur fonds publics qui apparaissent pourtant, dans la pratique judiciaire, comme particulièrement exposées aux risques de mésusage des fonds publics.
- Enfin, elle ne donne aucun droit de communication à l’AFA, l’isolant ainsi dans l’exercice de ses missions sans lui permettre d’interagir avec les autres services de l’État.
Une mission d’évaluation de la loi « Sapin 2 » a été décidée par la commission des Lois de l’Assemblée nationale le 16 décembre 2020, avec pour objectif d’établir un bilan approfondi des principaux apports de ce texte et de proposer des pistes d’amélioration.
C’est dans ce contexte et dans le cadre de la mission d’information de l’Assemblée que Didier Migaud, président de la HATVP, a été auditionné par les rapporteurs Raphaël Gauvain et Olivier Marleix. Après avoir présenté l’action de l’autorité, il a souligné plusieurs points :
- Le répertoire numérique des représentants d’intérêt ne remplit pas suffisamment son rôle et doit fournir des informations plus précises, et les ouvrir au public ;
- Le décret d’application de la loi a inutilement complexifié l’action de la Haute Autorité, en imposant les critères de l’initiative et de l’activité régulière, que les pays européens modèles en matière de lutte contre la corruption n’ont pas retenu ;
- Il plaide pour une fusion de l’AFA et de la HATVP, et une réflexion poussée sur le positionnement de l’Autorité par rapport à la Cour des Comptes et aux Chambres régionales des comptes, dont elle chevauche une partie des activités de contrôle ;
- Il insiste sur la nécessité d’un renforcement significatif de la coordination interministérielle des politiques publiques de lutte anti-corruption ;
- Enfin, concernant l’agrément des associations autorisées à se constituer partie civile intervenant sur les délits de probité, il se dit favorable à la sollicitation de l’avis de la HATVP à condition qu’elle soit dotée de moyens d’investigation adaptés, et suggère qu’un rapport de la Cour des comptes accompagne la procédure, au moment de l’agrément et son renouvellement.
Sources : Rapport annuel de l’AFA (31/03/2021), Compte rendu du Conseil National des Barreaux sur l’intervention de Didier Migaud (10/03/2021)